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    A ma sœur Cécile

    Cache-les dans ton cœur, toi dont le cœur pardonne,

    Ces bouquets imprudents qui fleurissaient en moi ;

    C'est toute une âme en fleur qui s'exhale vers toi ;

    Aux autres, je l'entrouvre : à toi, je te la donne

     

     


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    A l'amou 

    A l'amou

    Reprends de ce bouquet les trompeuses couleurs,

    Ces lettres qui font mon supplice,

    Ce portrait qui fut ton complice ;

    Il te ressemble, il rit, tout baigné de mes pleurs.

    A l'amou 

    Je te rends ce trésor funeste,

    Ce froid témoin de mon affreux ennui.

    Ton souvenir brûlant, que je déteste,

    Sera bientôt froid comme lui.

    A l'amou 

    Oh ! Reprends tout. Si ma main tremble encore,

    C'est que j'ai cru te voir sous ces traits que j'abhorre.

    Oui, j'ai cru rencontrer le regard d'un trompeur ;

    Ce fantôme a troublé mon courage timide.

    A l'amou 

    Ciel ! On peut donc mourir à l'aspect d'un perfide,

    Si son ombre fait tant de peur !

    Comme ces feux errants dont le reflet égare,

    La flamme de ses yeux a passé devant moi ;

    A l'amou 

    Je rougis d'oublier qu'enfin tout nous sépare ;

    Mais je n'en rougis que pour toi.

    Que mes froids sentiments s'expriment avec peine !

    Amour... que je te hais de m'apprendre la haine !

     A l'amou

    Éloigne-toi, reprends ces trompeuses couleurs,

    Ces lettres, qui font mon supplice,

    Ce portrait, qui fut ton complice ;

    Il te ressemble, il rit, tout baigné de mes pleurs !

    A l'amou 

    Cache au moins ma colère au cruel qui t'envoie,

    Dis que j'ai tout brisé, sans larmes, sans efforts ;

    En lui peignant mes douloureux transports,

    Tu lui donnerais trop de joie.

    A l'amou 

    Reprends aussi, reprends les écrits dangereux,

    Où, cachant sous des fleurs son premier artifice,

    Il voulut essayer sa cruauté novice

    Sur un coeur simple et malheureux.

    A l'amou 

    Quand tu voudras encore égarer l'innocence,

    Quand tu voudras voir brûler et languir,

    Quand tu voudras faire aimer et mourir,

    N'emprunte pas d'autre éloquence.

     A l'amou

    L'art de séduire est là, comme il est dans son coeur !

    Va ! Tu n'as plus besoin d'étude.

    Sois léger par penchant, ingrat par habitude,

    Donne la fièvre, amour, et garde ta froideur.

    A l'amou 

    Ne change rien aux aveux pleins de charmes

    Dont la magie entraîne au désespoir :

    Tu peux de chaque mot calculer le pouvoir,

    Et choisir ceux encore imprégnés de mes larmes...

    A l'amou 

    Il n'ose me répondre, il s'envole... il est loin.

    Puisse-t-il d'un ingrat éterniser l'absence !

    Il faudrait par fierté sourire en sa présence :

    J'aime mieux souffrir sans témoin.

    A l'amou 

    Il ne reviendra plus, il sait que je l'abhorre ;

    Je l'ai dit à l'amour, qui déjà s'est enfui.

    S'il osait revenir, je le dirais encore :

    Mais on approche, on parle... hélas ! Ce n'est pas lui ! 

    A l'amou 


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    J'avais froid !

     

    Je l’ai rêvé ! C’eût été beau

    De s’appeler ta bien-aimée,

    D’entrer sous ton aile enflammée,

    Où l’on monte par le tombeau.

    Il résume une vie entière,

    Ce rêve lu dans un regard :

    Je sais pourtant que ta paupière

    En troubla mes jours par hasard.

    Non, tu ne cherchais pas mes yeux

    Quand tu leur appris la tendresse.

    Ton cœur s’essayait sans ivresse,

    Il avait froid, sevré des cieux.

    Seule aussi dans ma paix profonde,

    Vois-tu ! J’avais froid comme toi,

    Et ta vie, en s’ouvrant au monde,

    Laissa tomber du feu sur moi.

    Je t’aime comme un pauvre enfant

    Soumis au ciel quand le ciel change ;

    Je veux ce que tu veux, mon ange,

    Je rends les fleurs qu’on me défend.

    Couvre de larmes et de cendre

    Tout le ciel de mon avenir :

    Tu m’élevas, fais-moi descendre. 

    Dieu n’ôte pas le souvenir !

    Mes poèmes  

    Marcelline Desbordes-valmores

     


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    Veillée

    Veillée 

    Quand ma lampe est éteinte, et que pas une étoile

    Ne scintille en hiver aux vitres des maisons,

    Quand plus rien ne s'allume aux sombres horizons,

    Et que la lune marche à travers un long voile,

    Ô vierge ! Ô ma lumière ! En regardant les cieux,

    Mon cœur qui croit en vous ,voit rayonner vos yeux.

    Veillée 

    Non ! Tout n'est pas malheur sur la terre flottante :

    Agité sans repos par la mer inconstante,

    Cet immense vaisseau, prêt à sombrer le soir,

    Se relève à l'aurore élancé vers l'espoir.

    Chaque âme y trouve un mât pour y poser son aile,

    Avant de regagner sa patrie éternelle.

    Veillée 

    Et tous les passagers, l'un à l'autre inconnu,

    Se regardent, disant : " D'où sommes-nous venus ? "

    Ils ne répondent pas. Pourtant, sous leur paupière,

    Tous portent le rayon de divine lumière ;

    Et tous ces hauts penser m'éblouissent... j'ai peur ;

    Mais je me dis encor : " Non, tout n'est pas malheur ! 

    Veillée

    Un cri


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